LE MONDE BOUGE - « Le monde bouge » a-t-on l’habitude d’entendre. Mais que dire du quartier du « Moulin à vent » et de ses métamorphoses ?
Lorsque les frères de Saint Jean de Dieu décidèrent en 1824 d’installer la maison de santé
« Saint Pierre, saint Paul » dans le château de Champagnieux à plus de dix kilomètres de Lyon, pouvaient-ils imaginer que, moins de deux siècles plus tard, l’institution serait ancrée au cœur d’un quartier, lui-même enchâssé entre une voie ferrée, l’ancienne Nationale 7* et un périphérique urbain à la frontière de deux villes d’une des agglomérations les plus importantes de France ?
En construisant le clocher de la Chapelle dans le courant du 19e siècle, pouvaient-ils soupçonner qu’il deviendrait le point de mire de milliers de voyageurs passant en train quotidiennement ?
Malgré ses propres transformations, adaptations et développements, l’institution traverse le temps. Elle est aussi un point de stabilité dans un monde qui donne parfois le vertige.
En invitant des artistes « à faire le portrait de l’hôpital dans son quartier », c’est un peu de l’alliance silencieuse entre l’institution et son territoire, à un moment donné de l’histoire, que nous voulions partager. En conviant en premier lieu l’artiste Gérard Depralon, c’est par l’acuité d’un regard neuf et précis que nous avons souhaité nous confronter à notre image.
Qu’il soit ici remercié pour la réponse sensible et poétique qu’il apporte à notre sollicitation et pour son engagement dans un travail subtil, à la charnière d’univers à la fois attachants mais parfois aussi déroutants.
JACQUES MARESCAUX
directeur du Centre Hospitalier St-Jean-de-Dieu
GERARD DEPRALON - Voyageur sans autre bagage qu’un appareil photographique « argentique », un petit carnet de notes et un stylo à bille, Gérard Depralon est un passant que nous n’oublierons pas à l’hôpital Saint Jean de Dieu.
Silencieux, respectueux, présent et bienveillant, l’artiste habite le monde par son regard et son écoute. L’homme est simple autant qu’exigeant. Il ne s’impose pas, il observe. S’il peut paraître parfois en retrait, c’est parce qu’il est à la recherche de la bonne distance ou du juste cadrage.
Partageant lors de ses séjours quelques instants de vie avec des patients, des résidents, des habitants, des professionnels, il s’est laissé doucement apprivoiser par ce territoire étrange et étranger. De retour à l’atelier, c’est à partir de ces bribes de présents rassemblés qu’il devient passeur : composant un récit sans histoire, une représentation cohérente construite de « briques » de vérité, d’images, de mots et de phrases entendues. De cette vision éphémère sourd une dimension poétique, colorée par une sensibilité mélancolique. Elle s’accorde au territoire et au sujet abordé : un quartier « de passages » en perpétuel devenir, un hôpital psychiatrique, des hommes et des femmes en mouvement, arpentant, ici comme ailleurs, l’espace et le temps.
A chaque page de ce journal, on ressent la vie, l’attachement, l’amour, car il nous semble que cette œuvre peut-être aussi reçue comme un poème d’amour adressé à ce petit monde qui est le nôtre.
DOCTEUR MARC ZIMMERMANN
président du Comité d’action culturelle de l’hôpital
CECILIA DE VARINE
chargée du projet culturel de l’hôpital